La Tour de 300 mètres se dévoile

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Marc Deren a écrit et mis en musique cette œuvre autour du mon­u­ment le plus emblé­ma­tique de la cap­i­tale : la tour Eif­fel. Une présen­ta­tion soignée, mise en scène par Vin­cent Mer­val, enchan­ta à trois repris­es la Comédie Bastille. Le sujet intéresse, tant l’histoire de cette tour reste mécon­nue. L’intrigue se cen­tre autour de Gus­tave Eif­fel, déjà bien établi, sa fille, son entourage, le monde ouvri­er et l’intelligentsia du moment. Le pianiste et directeur musi­cal John Flo­ren­cio accom­pa­gne les sept comé­di­ens qui incar­nent pour la plu­part plusieurs personnages.

Mélangeant des élé­ments de pure fic­tion avec des événe­ments réels, Marc Deren parvient sans peine à cap­tiv­er l’auditoire. Après une présen­ta­tion his­torique musi­cale per­me­t­tant de situer le con­texte his­torique de manière pré­cise et astu­cieuse, l’histoire en elle-même peut se dérouler.

Expo­si­tion uni­verselle, avancées tech­niques, doutes du créa­teur : tous ces aspects sont traités de manière attrayante, grâce en par­tie à une par­ti­tion inven­tive, en clin d’œil à divers styles. Il est égale­ment ques­tion de main d’œuvre immi­grée, en l’occurrence ital­i­enne, l’auteur se fix­ant sur un cou­ple venu chercher du tra­vail et une vie meilleure. Dif­fi­cile de traiter ce sujet, sachant que l’intégration ne s’est pas faite rapi­de­ment, loin de là. Dans le cas présent il aurait sans doute été béné­fique de dévelop­per un peu plus la présence de ce cou­ple unique­ment impor­tuné par un rus­tre, la valeur sym­bol­ique de ce geste ne porte pas comme elle devrait.

Les riverains cour­roucés, soutenus par de grands noms de l’époque, à l’image de Mau­pas­sant, appor­tent une note involon­taire­ment comique, puisque, réfrac­taire à toute moder­nité, ils lut­tent pour que cette tour, au mieux, ne voie pas le jour, au pire, soit détru­ite après 20 ans.

La dra­maturgie se développe donc sur la péri­ode de la con­struc­tion, le seul mort recen­sé, les défis tech­niques relevés puis l’ouverture devant un pub­lic pan­tois avant le tri­om­phe. Mais l’histoire ne s’arrête pas là puisque, n’oublions pas, il était ques­tion de démo­li­tion après deux décen­nies de présence. Entre temps, le scan­dale du Canal du Pana­ma passe par là, Eif­fel après avoir con­nu la gloire, se voit sali.

Quelle belle ambi­tion que cette entre­prise musi­cale. Des décou­vertes dans le cast avec notam­ment Bar­bara Per­oneille, une nature dotée d’une fort belle voix. Tous sont à saluer, même si, pour pren­dre un exem­ple, Stanis­las Clé­ment, avec la lourde tâche d’incarner Eif­fel, manque vraisem­blable­ment de méti­er pour être totale­ment con­va­in­cant. La scéno­gra­phie astu­cieuse, les cos­tumes créat­ifs sou­ti­en­nent par­faite­ment l’ambition de cette entre­prise que nous ne pou­vons qu’espérer voir bien­tôt sur scène. Ce futur spec­ta­cle pos­sède, c’est cer­tain, un véri­ta­ble potentiel.

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